• 011 - Postface

    Postface ~ Le Commencement de l'Epilogue

    Le cliquètement de la pluie résonnait contre les toits. Il se retourna une dernière fois vers le carnage, et puis partit définitivement. Le ciel lui laissait penser que les dieux étaient contre ce qui venait de se passer, ou contre sa survie. Alors il continua d'avancer. Au fur et à mesure de ses pas, la masse blanche au loin se rapprochait, et derrière lui, le monde tombait en ruines.
    Seul subsistait le chemin où il avançait.
     
    Le sang qui maculait son uniforme coulait à cause de la pluie. Il avait déjà jeté son arme sur le côté, avait quitté la masse de corps ensanglantés depuis déjà longtemps. Il était parfaitement trempé, ses cheveux bruns devenus noirs sous la pluie battante. Il marchait calmement, et ignorait l'eau glacée, et ignorait la morsure du vent. Il se dirigeait vers la silhouette blanche. La fatigue commençait à le gagner, son souffle devenait court. Mais il devait l'atteindre. Il devait plonger dans cette lumière.
     
    La fatigue était de plus en plus présente, mais la lumière plus proche. Il n'allait pas tarder à arriver à son but. Il releva la tête, et arborant un pâle sourire, se mit à courir. Il l'atteindrait plus vite. Cours, allez. Cours. Ne t'arrête pas. Personne ne t'arrêtera. Ni la pluie, ni le vent, ni la fatigue. Rien.
    Il courait, et derrière lui, le sentier commençait déjà à disparaître. Il savait qu'attendre de tomber dans le vide serait plus rapide, mais il devrait son salut à cette lumière blanche. Il préférait aller en enfer que d'aller au néant. Le monde allait être détruit, seuls subsisteraient le Paradis, l'Enfer et le néant. Soit il passait par ce portail, et rejoignait la salle du jugement divin, soit...
    Il n'aurait plus d'espoir de survie.
     
    Quelques mètres. Le sol sous ses pieds disparaissait. Il accéléra le rythme, et à la dernière minute, il sauta...
     
    Un rocher le percuta de plein fouet. Il sombra dans le néant.
     
     
    Il ouvrit les yeux, ou du moins, eu le sentiment de faire cette action. Tout autour de lui était noir. Il avança à l'aveugle, se heurtant contre des objets qu'il ne voyait pas, jusqu'à trébucher sur quelque chose. Il ramassa l'objet. Il avait une forme de lampe de poche. Le jeune homme chercha le bouton, et, une fois qu'il l'eut trouvé, appuya dessus. Soulagement, la lampe fonctionnait, et fit la lumière sur le monde où il se trouvait. Ce qu'il vit ? Çà et là, des ruines du monde qu'il avait connu, éparpillées. En guise de sol et d'horizon, une masse noire. Sa vue portait aussi loin que ce que sa torche pointait. Désespéré, il s'assit sur le sol, et déposa son chapeau sur un morceau de roche à côté de lui. Stupeur, sa coiffe tomba en cendres, suivie de la roche sur laquelle elle reposait. Effrayé, le jeune homme recula rapidement, et se heurta à une autre ruine, qui disparut elle aussi. Il sursauta en sentant la matière disparaître aussi rapidement dans son dos, et, sous le coup de la peur, poussa un grand cri.
    Il se jeta à plat ventre pour attraper la lampe le plus vite possible. Il eut du mal à la saisir, et une fois qu'il l'eut dans les mains... La lumière vacilla, disparut, et la lampe tomba en poussière.
     
    Alors, effrayé par le vide autour de lui, il se recroquevilla, et se mit à pleurer.
     
     
     
     
     
     
     
     
    "Il a commencé à digérer."
    Il ouvrit les yeux d'un coup, et chercha la personne qui avait parlé. Dans l'obscurité ambiante, il ne la trouva pas. Il essaya alors d'utiliser ses mains, mais apparemment, la personne qui avait parlé n'avait pas de corps. Elle n'était qu'une voix qui s'adressait à lui dans l'immensité sombre qui l'entourait. De plus, elle lui semblait familière.
    "Qui ? "
    Il avait posé cette question pour à la fois demander qui avait commencé à digérer et qui était la personne qui lui parlait.
    "Tu sais très bien qui je suis... Sinon, tu te trouves dans le Néant. Il a absorbé le monde et maintenant, il commence à le digérer. Toutes les choses ayant une existence rationnelle vont disparaitre ! "
    "Mais... Si tout doit disparaitre, pourquoi tu es encore là ? "
    Question idiote, en soi, puisqu'elle arracha un petit rire à l'interlocutrice du garçon.
    "Je ne suis pas une existence rationnelle ! Tu as déjà vu une voix sans corps ? "
    Il hocha négativement la tête, mais se douta que la voix ne pouvait pas le voir. Il se leva et avança à l'aveugle. Il avançait doucement, par peur de s'heurter encore contre un objet. La voix ricana encore.
    "Ça sert à rien de prendre des précautions ! Il a déjà digéré tout ce qui n'avait pas d'âme. "
    "Est-ce qu'on a une chance de survie ? "
    "Dire aucune serait faux, mais... Disons, tu as une chance sur l'infini de trouver la porte blanche."
    L'espoir quitta ses yeux. Une chance sur l'infini, autrement dit, il n'y arriverait jamais. Mais sait-on...
    "Il me reste combien de temps ? "
    "Le temps n'est pas une notion fiable, ici. Mais bon, avec de la chance, tu en auras assez pour t'en sortir. "
    "Allons-y, alors. "
    Il se leva et se mit à marcher dans le noir. Il n'y voyait rien, aussi, il avançait relativement lentement. La voix rigola.
    "Si tu avances aussi lentement... Tu n'y arriveras pas ! Tu devrais courir. "
    Courir... Bonne idée. Mais il se fatiguerait vite, non ? Et puis zut. Il essayerait. Il se mit à courir. Pendant quelques minutes, il ne sentit pas la fatigue, et donc, il accéléra. Il put prendre une grande vitesse en quelques minutes. La voix s'en inquiéta.
    "Tu ne ressens déjà plus les besoins vitaux, ce qui veut dire qu'il a déjà commencé à te digérer. Accélère ! "
    Un temps infini s'écoula. Il courait de plus en plus vite dans le noir, et toujours rien ne se profilait à l'horizon. La voix lui intimait toujours d'accélérer, mais il avait déjà atteint son maximum depuis longtemps. Il commençait à perdre espoir. Il plissait les yeux pour scruter l'horizon, et alors qu'il lui semblait apercevoir un infime pixel de lumière au loin, il s'arrêta soudainement et poussa un cri. La voix s'indigna.
    "Qu'est-ce que tu fais ? On s'approche ! Ne te rends tu pas compte de la chance que tu as ? "
    "Ma... MA MAIN ! "
    Il palpait sa main gauche qui se craquelait. Elle ne tarda pas à tomber en cendres et à disparaître, lui arrachant un nouveau cri, suivit de larmes. La voix se mit aussi à hurler.
    "COURS. NE T'ARRETE PAS DE COURIR, SINON TU VAS DISPARAITRE ! "
    Il rouvrit les yeux et s'arrêta de pleurer. Il devait arriver à la sortie. Il se remit à courir vers le pixel blanc, dont la taille augmentait doucement. Ses vêtements commençaient à disparaître, mais il continuait à courir. Il ne devait plus s'arrêter. Lorsqu'il arrivait à une centaine de mètres du point blanc, il tomba tête la première. Il avait heurté quelque chose. Lorsqu'il rouvrit les yeux, il vit le monde quelques secondes avant qu'il ne soit aspiré. Comme si on lui offrait une seconde chance de sortie. Maintenant totalement nu, il frissonna en sentant la pluie sur sa peau, et ralentit la cadence. Il commençait à ressentir de nouveau la fatigue, la douleur, le froid... Il avait du mal à continuer d'avancer. Nu, épuisé, sa main gauche disparue, de plus, la voix l'avait quitté au moment où il était arrivé dans cette sorte de dimension illusoire. Il continuait d'avancer seul vers la sortie, lentement. Il souriait en voyant le portail lumineux de se rapprocher. Son sourire s'effaça presqu'aussitôt lorsque ses parties de son ventre et ses jambes tombèrent ensembles.
    Non ! Pas maintenant !
    Il essaya d'accélérer. Il boitait, et tenait son bras gauche qui devenait poussière.
    Son bras gauche avait entièrement disparut, ainsi qu'une grande partie de sa jambe gauche, qui faisait qu'il sautillait. Sa nuque commençait à disparaître, suivie de son dos et d'une partie de son visage. Quelques centimètres le séparaient maintenant du portail. Cette fois, il jouait sa vie. Il tendit faiblement sa main vers la lumière...
    Et il lui sembla qu'il avait traversé le portail.

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